Très cher journal, c’est peut-être la dernière fois que j’écris en tes pages.
Car sous mes airs calmes là, maintenant, tout de suite, je crains fortement pour ma vie et ce pour une raison très simple. Depuis la dernière fois, Anthony a changé de comportement envers moi. Délaissant les coups de pieds ou de cravache, il se fait maintenant calme, observateur, suspicieux.
Non pas que l’absence d’atteinte à mon intégrité physique me manque particulièrement, soyons clair, j’ai tout simplement peur que ce soit le calme avant la tempête… De plus, je l’ai aperçu sortant rapidement de ma geôle ce matin, l’air énervé. J’ai peur qu’il t’ait lu. J’ai bien tenté de pêcher des informations auprès de la population de rats qui habite ma « demeure », mais cela n’a rien donné. Pire, ils ricanaient…
[message] Edit : J’ai tout lu ! Depuis le début ! Tu vas prendre cher ! Signé : Anthony, chef tyrannique. [/message]
Il va falloir que je fasse attention, très cher journal.
Ce matin, c’était assez calme. Pas de séance avant 15h pour moi, j’avais donc normalement tout loisir de m’occuper comme je le souhaitais. Enfin ça, ce serait dans un monde meilleur. A la place, j’avais donc tout loisir de m’occuper à récupérer une dédicace de Genndy Tartakovsky pour Anthony et ce dès 5h du matin à faire la queue, pour être sûr de l’avoir. Dans un ultime élan de provocation, pour vérifier mes dires d’un peu plus tôt, j’ai demandé à ce qu’il lui dessine un petit caca qui parle avec l’accent du sud. Mais non, rien, pas même une veine qui se gonfle. Bizarre…
Mais l’heure n’était de toute façon pas aux suspicions trop appuyées. Il fallait que je sois concentré, car mon après-midi marathon punitive commençait, avec pas moins de 4 films à enchaîner dont certains au gout douteux.
Et le premier de la lancée était Extraordinary Tales, par Raul Garcia.
Nicolas m’avait parlé de l’émotion dégagée par le film, surtout pour le début, et je le comprends parfaitement. En effet, celui-ci est en fait constitué de 5 court-métrages adaptés de nouvelles d’Edgar Allan Poe, avec un narrateur connu dans le milieu de l’horreur. Pourquoi émotion donc ? Et bien tout simplement parce que le premier est narré par… Sir Christopher Lee. Avec son décès très récent, il est difficile de ne pas sentir un petit nœud dans le ventre lorsqu’il débute sa narration…
A côté de ça, le film est une très agréable surprise. Changeant de style graphique et de narrateur à chaque court, c’est un petit dépaysement à chaque fois et c’est toujours agréable à regarder. Mention spéciale au 2ème court, Le Coeur Révélateur, où le choix de la forme m’a particulièrement plu.
Pas le temps de souffler dès le générique de fin commencé que Jean-Robert, le bras armé de notre Jabba le Hutt local, vient me tirer de mes rêveries pour littéralement me traîner par les pieds jusqu’à la séance suivante. Car oui, autant les jours précédents, j’avais joué la chose de façon assez intelligente, saupoudrant mes journées de longs-métrages entre deux instants plus calmes, autant quand j’ai planifié mon vendredi je devais m’être enfilé deux kilos d’herbe à chat dans chaque narine, ne me laissant qu’une vingtaine de minutes pour aller d’un film à l’autre. Apparement, je devais me dire qu’en fin de festival on était en forme. Si je retrouve mon moi du passé, je lui casse la gueule.
BREF. On me traînait donc par les patounettes vers le film d’après, qui était donc The Snow Queen 2. Il se pourrait d’ailleurs que les lecteurs du journal local demain entendent parler de moi entre ces deux séances, dans l’article « Un homme hurle à la mort à l’entrée du Décavision » ou encore « Ivre, il va voir The Snow Queen 2. ».
Nan, j’exagère. C’était pas si horrible que ça, même si je partais avec un avis plus négatif que la chaleur dans le coeur d’Anthony. Et au final, c’était pas si maaaaal. ‘Fin, entendons nous, c’était pas bien. Mais c’était pas horrible. Déjà on sent que le studio russe à l’origine du film a fait de très gros progrès graphiques depuis le précédent, ce qui, même si c’était pas bien dur hein, est une excellente chose. Le chara design des personnages est toujours plutôt moyen, mais il y a eu un réel effort sur les décors, la lumière ou encore l’animation ! Yeah !
Et pour l’histoire, et bien ma foi on sent fortement que la cible visée est uniquement le secteur jeunesse. Ça ne vole pas haut, que ce soit sur le fond comme sur l’humour et tout est prévisible. Mais bon, même si c’est sans grande prétention, c’est plus qu’honnête.
A la fin de la séance, ce coup-ci, j’essaye de faire une blague à Jean-Robert, en me cachant entre deux fauteuils. Hihi. Bon, on dit que c’est dans les épreuves qu’on apprend la vie, bein je vais vous éviter celle-ci hein. C’était pas une bonne idée et c’est dans une sorte d’état second que je suis allé vers ma troisième séance : Eden’s Edge.
C’est surement pour ça d’ailleurs que j’ai eu beaucoup de mal avec ce film… on va dire ça. Le métrage propose un principe assez original, celui de nous offrir plusieurs courts-métrages rassemblé en un seul et le tout, vu du dessus (comme vous pourrez le voir sur l’image d’illustrations). Jusque là, pas de soucis. Sauf que chaque court est narré et que les personnes nous parlent de leur vie passée, de comment celle-ci à évoluer, le tout pour nous délivrer une morale régulièrement douteuse.
Il fut presque impossible de s’attacher aux personnages et encore moins de tenir physiquement devant le film. Vraiment. C’est lent, inintéressant et je me réjouis d’avance d’écrire pour ce film dans le future webzine. J’imagine déjà mes collègues en train de rigoler, pendant que je pleurerais des larmes de sang sur le clavier de mon pauvre petit ordinateur qui n’avait rien demandé.
Ce coup-ci, pas de blague pour Jean-Robert (j’apprends assez vite, par moment) et pour me féliciter, c’est porté comme un sac à patates sur l’épaule que je suis transporté vers la séance événement de Phantom Boy à Bonlieu. Sans avoir mangé d’ailleurs, vu que le gorille avait l’air de ne pas entendre mes supplications alors qu’on passait devant différentes gargotes de nourritures rapides. Mention spéciale d’ailleurs à mon chef adoré qui avait alors jugé bon de m’envoyer une photo de lui en train de se frotter avec des bagels, ceux si désirés quelques jours plutôt. Je me vengerais.
En place dans la salle, on sent que pour certains c’est la fin du festival. L’ambiance est au rendez-vous et les avions en papier volent comme jamais dans l’espace aérien de la grande salle d’Annecy. ça rigole, ça hurle, non vraiment, c’est pour ce genre de moments qu’on aime ce festival.
Et en ce qui concerne le film, je dois bien avouer que mes attentes furent comblées. Jean-Loup Felicioli et Alain Gagnol, après un très sympathique Une vie de chat, rempilent avec une nouvelle jolie histoire, magnifique graphiquement, qui m’a fait rire à de très nombreuses reprises et même donné quelques frissons.
Très ancré dans un style des années 80, cette petite histoire policière destinée aux plus jeunes passe très très bien et j’espère de tout coeur qu’elle marchera en salles.
Et c’est donc un poil avant 23h que je fus relâché de cette journée au combien intense, qui m’éprouva autant les nerfs que mon physique de petite fleur fragile. Il était temps de retrouver mes planches de bois, ma paille et mes potes les rats, pour une grosse nuit de sommeil avant d’attaquer le, hélas, dernier jour du festival.
En espérant que tout se passera bien et que mes craintes de fuites du contenu de ce journal ne soient pas avérées. Au cas où, mon testament se trouve dans la salle de bain, là où je suis sûr qu’Anthony ne le trouvera jamais.
Je te dis à demain, peut-être.
Bisous esquimau.