Nous tenons le conte classique de l’édition 2020 du festival d’animation d’Annecy (le film est en compétition officielle). Ginger’s Tale, film russe en 2D très traditionnelle, semble tout droit venir d’une époque révolue (on pense notamment à la saga du Cygne et de la Princesse et Richard Rich, la métamorphose princière en moins). Loin d’être révolutionnaire, il demeure sympathique et comporte son lot de qualités. VVERH Film Company délivre alors un conte suranné qui ne manquera pourtant pas de divertir un large public (qui n’est plus trop habitué au classicisme des années 90).
Résumé : Potter, un garçon gentil et pauvre, trouve un objet magique appelé la Pierre de Feu, qui le rend riche et cruel. La méchante Reine décide de tuer Potter pour s’accaparer la Pierre de Feu. Seule une fille dénommée Ginger est en capacité de le sauver, grâce à son dévouement.
Une reine aux pouvoirs magiques, une jeune fille bercée de rêves amoureux et un bellâtre ambitieux : les stéréotypes du conte classique sont rassemblés dès les premières séquences du film. Rassemblant tous les poncifs du genre, Ginger’s Tale (Le conte de Ginger en VF) ne surprend jamais vraiment sur le fond, d’autant plus que le projet final de l’antagoniste de service rappelle beaucoup celui de La Petite sirène des studios Disney (il est question de mariage). Les relations entre les personnages sont pleines de vitalité : qu’il s’agisse de Ginger et Potter (le potier du village) ou de la reine et de son acolyte Oups (qui rappellent forcément la relation plutôt comique liant Yzma et son serviteur Kronk dans une autre production de la firme aux grandes oreilles). Nous avons même le droit à une scène post-générique sur les méchants de service. Si l’histoire d’amour au centre du récit est quelque peu fleur bleue, elle renoue avec le classicisme caractérisant le film et va de pair avec les caractéristiques conventionnelles du conte animé.
Sur le plan graphique, l’animation est aussi surannée que le scénario mais de belles idées de décor complexifient la simplicité apparente des traits dessinés. On pourrait même dire que l’apparat graphique a le charme de ses imperfections, d’autant plus qu’on ne peut que saluer la décision à contre-courant de proposer un film en dessins traditionnels. Quelques beaux plans jalonnent le métrage, à l’image du design du château de la reine mis en valeur par les angles de prises de vues dominant parfois les personnages en plongée. Ombres et flammes finissent d’enjoliver un univers graphique élevé par l’astucieuse mise en scène. Les images promotionnelles du film pouvaient inquiéter, la mise en mouvement est rassurante même si la technique animée demeure perfectible (notamment lorsque des figurants investissent l’écran).
Malgré tous les efforts de mise en valeur, tout cela manque cruellement de modernité. Qu’il s’agisse des images aux teintes sépia jusqu’aux chansons parsemant le film donnant au projet des allures de musical daté, l’impression de découvrir un film des années 90 ne nous quitte jamais. Les spectateurs conquis seront alors ceux qui chercheront un plaisir nostalgique, d’autant plus que le film comporte une bande originale aux accents russes désuets. Et ce ne sont pas les rares éléments étranges qui permettent au film de vraiment convaincre un public d’initiés (on se questionne encore sur les chiens liés à la pierre de feu au centre de la quête héroïque).
En somme, Ginger’s Tale de Konstantin Scherkin n’est pas le film le plus innovant qui soit puisqu’il fait le choix de caractéristiques désuètes. En revanche, si les surprises se font rare, le long-métrage se suit sans déplaisir et conte une belle histoire au classicisme charmant. Sans étincelles (ni mauvais jeu de mots), le film trouvera sûrement son public.
Critique rédigée par Nathan