Fraîchement nominé à l’Oscar du Meilleur Film d’Animation cette année, penchons-nous au très intéressant Anomalisa de Duke Johnson et de Charlie Kaufman, qui signe ici sa première réalisation après de nombreux scénarios pour entre autres Michel Gondry et Spike Jonze.
Anomalisa nous raconte une journée dans la vie de Michael Stone, qui est de passage à Cincinatti pour y donner une conférence. Blasé, fatigué, l’homme séjourne dans un hôtel de cette ville qui fait remonter en lui de vieux souvenirs, pas forcément très bons. Par ce démarrage assez lent, légèrement pesant, on semble tendre vers la comédie dramatique au travers de la rencontre avec une ex-femme et quelques traits d’humour bien grinçant, illustré par une visite dans un lieu insolite ou encore via une rencontre avec un chauffeur de taxi.
Mais c’est là qu’apparaît tranquillement la vraie nature et la force de ce long-métrage, avec un malaise qui s’installe au fur et à mesure que l’on croise de nouveaux personnages. Par un procédé qu’il vous faudra découvrir, les réalisateurs nous montrent la détresse de son héros, qui ne voit plus du monde qu’un amas de banalités et d’ennui.
Charlie Kaufman maîtrise son scénario, son film, ce qui fait qu’il est très facile pour le spectateur de se s’identifier à la situation du protagoniste et de réfléchir à sa propre vie.
On descend avec lui vers les enfers de sa crise existentielle, et je suis passé d’un banal désintérêt à une compassion que j’ai rarement ressenti pour un personnage de film. D’autant plus quand arrive le personnage titre, Anomalisa, point culminant du métrage qui va tout bouleverser dans un éclat lourd de conséquences et ô combien puissant, seulement terni par une fin légèrement expéditive.
[quote author= »David » bar= »true » align= »left » width= »300px »]Anomalisa fait partie de ces exemples typiques de film d’animation cassant l’image infantilisée qui colle à ce médium.[/quote]
Aux côtés de l’écriture de Charlie Kaufman, la bonne expérience de la stop-motion de Duke Johnson, qu’on a pu admirer entres autres lors d’un épisode de la série Community, vient compléter ce duo de réalisateurs. Il apporte de quoi appuyer graphiquement le long-métrage grâce à un procédé d’animation savamment choisi, tant celui-ci se révèle être catalyseur de son aspect poétique.
En effet, au travers de ce monde que l’on découvre par les yeux de Michael Stone, la stop-motion délivre un effet très poupée, artificiel, adapté à la dépression de cet homme, qu’un film en prise de vues réelles n’aurait surement pas su retranscrire.
Une technique d’ailleurs parfaitement maîtrisée ici, tant Anomalisa impressionne par sa richesse graphique, que ce soit en matière d’animation pure ou sur la quantité de personnages et de détails dans les décors. Un travail colossal, parfois à la limite du photo-réalisme qui pourra servir sans aucun doute de cas d’école.
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