Trois ans après leur dernier univers original (l’extraordinaire Coco de Lee Unkrich), les studios Pixar Animation reviennent enfin avec un univers inédit. Même si les studios ont excellé dans l’art de créer des suites de qualité (dans l’ensemble), on retrouve avec plaisir une histoire originale dans un monde fort surprenant. Après tout, l’idée de mêler heroïc-fantasy et urbanisme avait tout pour plaire sur le papier d’autant plus qu’à la barre on retrouve Dan Scanlon qui a offert une jolie préquelle à Monstres & Cie. Alors on attendait avec impatience et fébrilité ce nouveau film : En avant !
Résumé : Dans la banlieue d’un univers imaginaire, deux frères elfes se lancent dans une quête extraordinaire pour découvrir s’il reste encore un peu de magie dans le monde.
Disons le tout de suite, En Avant est un très bon film. Pourtant, en disant cela, on rompt avec les habitudes qu’ont pu prendre les studios Pixar au fil de leurs productions (malgré quelques films moins aboutis entre 2011-2015). Le second long-métrage de Dan Scanlon avait pourtant tout ce qu’il fallait pour atteindre l’excellence : un univers très riche à exploiter, un propos fort et plein d’émotions à traiter (même si le deuil est désormais le fer de lance des synopsis chez les studios à la lampe de bureau) et des personnages inscrits dans notre modernité. Pourtant, lorsque le générique de fin apparaît à l’écran, on regrette d’avoir seulement découvert un beau film aux ambitions relatives.
Profondément classique dans sa forme et son récit, le nouveau film des studios Pixar rassemble tous les ingrédients nécessaires au parfait divertissement. Contant la quête de sens d’une relation fraternelle par le biais d’une véritable « quête » au sens héroïc-fantasy du terme, cette production se révèle souvent touchante (et l’on n’en attendait pas moins de la part des maîtres en la matière) sans atteindre les sommets lacrymaux de Là-Haut ou Coco. Pour cela, il aurait fallu oser davantage en cours de narration et emprunter des voies plus inattendues pour prendre aux tripes les spectateurs de tous âges d’autant plus que le film ne peut compter sur sa bande-originale trop anecdotique pour nous faire pleurer (là où Coco possédait une belle soundtrack employée à bon escient).
Véritable ventre mou du film, la « quête » des deux frères aurait pu délivrer tellement plus d’originalité et de surprises pour renforcer le propos sur le deuil du film. Il faut aller « en avant » dans l’aventure mais également dans la vie et le long-métrage aurait gagné à plus de créativité sur le plan graphique. On pense notamment aux innombrables ressources permises par la rencontre entre l’héroïc-fantasy et le modernisme technologique qui ne dépasse jamais vraiment les simples bonnes idées. Après tout, le monde dans lequel vivent Ian et Barley est peuplé d’être fantaisistes. L’introduction est pleine de promesses et dévoile un monde à l’originalité folle pour ne jamais vraiment la réinvestir par la suite – à l’exception de la taverne de la Manticore qui n’est pas sans rappeler l’univers décomplexé de Shrek – tandis que la conclusion est brillamment menée et clôt avec intelligence une intrigue émouvante.
En Avant est un cas d’école : un beau film aux personnages fort pratiques pour les avancées narratives auquel il manque un brin de singularité. Pourtant, au-delà de sa réflexion vibrante d’émotions sur le deuil et le fait de pouvoir se construire malgré l’absence d’un être important (en l’occurence, la figure paternelle), le scénario pouvait compter sur l’opposition entre le monde d’avant – enchanté et chaleureux – et le monde urbain. Même si le duel final métabolise en quelque sorte ce combat en question entre la magie et les débris du monde urbain, le scénario a tendance à privilégier les scénettes comiques qui font mouche au lieu d’approfondir son propos sur la société et son individualisme. C’est pourtant là que le long-métrage aurait pu atteindre de nouvelles sphères et pleinement révéler son potentiel.
Au final, En Avant est une très belle production qui confirme le savoir-faire esthétique des studios Pixar. Exemple ultime de classicisme sur tous les plans (narratif et graphique), le second long-métrage de Dan Scanlon manque de caractère pour pouvoir prétendre au titre de chef d’oeuvre. C’est d’autant plus dommage que tous les éléments du récit se prêtaient au foisonnement créatif. A présent, on compte sur Pete Docter pour nous surprendre comme il se doit avec Soul en juin prochain ! A l’image de Ian, il serait temps que les studios Pixar embrassent pleinement leur bel héritage…
Critique rédigée par Nathan