Presque un an après sa présentation au film d’animation d’Annecy, le long-métrage de Masashi Ando (qui a notamment travaillé au sein des studios Ghibli) et Masayuki Miyaji arrive enfin dans les salles françaises pour rassasier les amoureux d’héroïc fantasy animée, via Star Invest Films France. Le Roi cerf est une aventure traditionnelle qui touche au cœur en fascinant davantage par son imagerie léchée que par son scénario un peu alambiqué qui questionne néanmoins notre rapport au monde par le prisme d’une fable écologique.
Résumé : Van était autrefois un valeureux guerrier du clan des Rameaux solitaires. Défait par l’empire de Zol, il est depuis leur prisonnier et vit en esclave dans une mine de sel. Une nuit, la mine est attaquée par une meute de loups enragés, porteurs d’une mystérieuse peste. Seuls rescapés du massacre, Van et une fillette, Yuna, parviennent à s’enfuir. L’Empire de Zol ne tardant pas à découvrir leurs existences, il mandate Hohsalle, un prodige de la médecine pour les traquer afin de trouver un remède. Mais Hohsalle et Van, tous deux liés par le fléau qui sévit, vont découvrir une vérité bien plus terrible.
In medias res, le long-métrage nous plonge dans la guerre insidieuse qui oppose l’empire de Zol, au pouvoir, et la résistance d’Aquafa. Au fil d’une séquence d’ouverture violente et muette qui en dit long sur les enjeux du conflit sous-jacent, les personnages principaux du récit se dévoilent. Van, un ancien chef de guerre fait prisonnier prend sous son aile la jeune orpheline Yuna alors qu’une ville est attaquée par une meute de loups sanguinaires. Van est alors infecté par le « mittsual », une étrange maladie qui se propage et blesse prioritairement les soldats de Zol. S’engage alors pour les nombreux personnages qui composent la narration une quête de vérité et de liberté qui frôle l’éparpillement (restreignant alors l’universalité de son public, les jeunes spectateurs risquant de se perdre au gré des motivations de chacun).
Désormais liés par le destin, Van et Yuna reprennent goût à la vie au coeur d’un village célébrant les vertus de la nature (dans une succession de séquences qui tendent à se répéter) tandis que les autres protagonistes les recherchent pour en faire des alliés ou s’en emparer pour les étudier. L’empire Zol missionne notamment Hohsalle pour déceler les mystères du mittsual et en concocter un remède. Ces fils narratifs servent à ériger toute une réflexion sur notre monde et la nature, qu’on la soumette, qu’on l’étudie ou qu’on l’embrasse pour bien vivre (comme les villageois où Van et Yuna survivent). Comme Nausicaa ou Mononoké en leurs temps, Le Roi cerf observe les comportements humains au sein de la nature, sans forcément égaler la portée fondatrice de ces œuvres miyazakiennes.
Le premier long-métrage de Masashi Ando est aussi beau qu’il est frustrant sur le plan narratif. Si les intrigues et les personnages sont innombrables, le film se résume finalement à un imbroglio de quêtes individuelles tout en développant surtout la relation touchante entre les deux protagonistes principaux. Leur attachement est filé tout au long de l’histoire quitte à imposer quelques séquences de montage convenues dans la pure tradition des productions nippones. Le Roi cerf est une belle proposition animée qui recèle des trésors d’animation mais qui peine parfois à s’émanciper des conventions du genre, à l’image de son esthétique traditionnelle soignée qui propose de véritables séquences oniriques (à l’image d’une course poursuite en forêt magnifique) mais qui ne s’éloigne jamais vraiment de ce que nous avons l’habitude de voir. Etrangement, le film se complaît dans les séquences intimes au lieu de déployer tout son potentiel guerrier, y compris dans un dernier quart filmique qui peine à lâcher les chevaux pour nous embarquer.
Au final, Le Roi cerf est un long-métrage fascinant parce qu’il parvient à questionner notre rapport à la nature (comme Hayao Miyazaki le faisait déjà des années auparavant) tout en contant les aventures d’un binôme attachant. Cependant, à trop vouloir démultiplier ses intrigues et ses personnages, le film peine à trouver un rythme satisfaisant. En résulte alors une œuvre imparfaite qui nous intime toutefois un vif espoir quant au potentiel créatif de l’équipe à la barre du projet.
Et n’oubliez pas de rester jusqu’à la fin du générique, le destin de certains personnages pourrait vous y être révélé !