Le rêve au cinéma permet toutes les exubérances et l’équipe du Royaume des abysses l’a bien compris. Dans une odyssée aux visuels sidérants, Tian Xiaopeng (qui signe ici son deuxième long-métrage) invite ses spectateurs à faire corps avec la quête d’une jeune fille à la recherche de sa mère disparue. Une quête douloureuse noyée dans une imagerie impressionnante (ou épuisante ?) dessinant les contours d’une œuvre aux portes de la révolution dans la production animée mondiale. Autant vous dire que cette expérience est à vivre en salles pour en savourer toutes les réussites !
Résumé : Shenxiu, une fillette de 10 ans, est aspirée dans les profondeurs marines durant une croisière familiale. Elle découvre l’univers fantastique des abysses, un monde inconnu peuplé d’incroyables créatures. Dans ce lieu mystérieux émerge le Restaurant des abysses, dirigé par l’emblématique Capitaine Nanhe. Poursuivis par le Fantôme Rouge, leur route sera semée d’épreuves et de nombreux secrets. Leur odyssée sous-marine ne fait que commencer.
Découvrir Le royaume des abysses c’est mettre ses yeux et son cœur devant une œuvre qui se démène à nous émerveiller et à nous surprendre avant de révéler son vrai visage en fin de parcours. Dans une introduction aux accents sombres et oniriques donnant le ton et les enjeux du récit – la quête d’une mère évanouie dans la nature – le long-métrage nous embarque dans une aventure menée à vive allure. C’est aussi dans son générique resplendissant qui déborde de mouvements que le film de Tian Xiaopeng annonce la succession de plans sidérants à venir. Et l’on comprend vite que les promesses seront tenues au gré d’un délicieux plan séquence dans les cuisines du restaurant des abysses, théâtre du récit, révélant l’excellence du chef de l’établissement, au centre de l’histoire, et les loutres qui s’affairent en coulisses pour ravir les palais de clients impatients.
Comme tout récit initiatique qui se respecte – difficile de ne pas penser à l’exploration du pays des merveilles ou de l’aventure onirique de Chihiro dans le film d’Hayao Miyazaki – Le royaume des abysses est une histoire apparemment pavée de rencontres absurdes. On pense alors que l’histoire n’est peut-être pas à la hauteur de l’imagerie foisonnante mais c’était sans compter le dernier quart du métrage prenant finalement à bras le corps son propos originel. L’émotion se déploie enfin et le climax, d’une puissance narrative indéniable avec ses différents niveaux de lecture, permet d’emporter l’adhésion de son public. Trop en dire ici serait gâcher la vague émotionnelle qui vous submergera. Une simple discussion en champ contre-champ déborde alors d’inventivité dans la mise en scène grâce aux ombres, aux particules et aux textures habitant le cadre. Objet de fascination graphique autant que curiosité narrative, Le royaume des abysses est une véritable expérience qui se ressent autant qu’elle se contemple.
On pourrait évidemment se dire que le film aurait mérité d’être plus court et de profiter d’une bande originale plus atypique pour embrasse pleinement sa fougue visuelle mais l’engouement se charge de nous faire oublier ces menus points faibles. L’emballement graphique (et narratif) de cette histoire touchante emporte tout sur son passage, à l’image d’une course au beau milieu d’une mer séparée entre les vagues débordant de voitures, de baleines et de vaches (oui, vous avez bien lu !) Film de l’agitation – une agitation graphique mais aussi interne tant les personnages se caractérisent par des questionnements – Le royaume des abysses propose à l’écran un character design et une animation mouvants. Les personnages semblent ainsi s’agiter au rythme des ondes marines dans une esthétique quasi picturale, les tableaux de maître se succédant alors sans répit pour le plus grand plaisir des spectateurs ravis.
Le royaume des abysses est une véritable explosion cinématographique qui met du temps à révéler ses forces narratives tout en nous abreuvant de sa puissance visuelle. Une histoire où tout est mouvement dans la construction d’un océan de créativité. Que l’on en ressorte fasciné ou épuisé, le constat est le même : le long-métrage de Tian Xiaopeng est à nul autre pareil.
Et un dernier conseil pour la route, restez bien assis pendant le générique, la poésie se poursuit…
En salles le 21 février via KMBO.