Décidément, le chevalier rêveur de Cervantès est à la mode. Après Les inséparables (distribué par KMBO en France, comme ce nouveau long-métrage), Don Quichotte est à l’honneur puisque le film de Gonzalo Gutiérrez (qui signe ici son premier projet animé) conte l’histoire d’un de ses descendants (spirituels ?) Et s’il est évident que Les Explorateurs : l’aventure fantastique a de la suite dans les idées, il n’en demeure pas moins profondément anecdotique. En piochant de ci de là des idées pour construire son histoire, le film en perd son âme d’autant plus qu’il mise sur un rythme effréné empêchant de réellement développer ses personnages et leurs aspirations. Le jeune public auquel il s’adresse s’en contentera peut-être mais est-ce suffisant ?
Résumé : Alfonso, Arthur et Victoria sont trois explorateurs en quête de grandes aventures. Mais difficile de faire les quatre cents coups dans une petite ville si paisible… Et s’ils se retrouvaient soudain avec d’improbables agents secrets à leurs trousses ? Et si une tempête magique risquait de dévaster leur maison ? Et si des lapins zinzins, des dragons et des machines volantes étaient de la partie ? En route pour une incroyable mission !
Alfonso est un adolescent rêveur, moqué par une grande partie de la ville. Mais le jour où un promoteur immobilier tyrannique se met en tête de s’emparer des propriétés pour construire une cité à son image, les mentalités sont prêtes à changer ! Accompagné d’amis aussi téméraires que lui mais aussi de compagnons imaginaires – des lapins plus « crétins » que nature – il se lance dans le sauvetage de sa ville. Et l’aventure est au rendez-vous, à tel point qu’elle semble être l’unique objectif de l’équipe créative, délaissant rapidement la vraisemblance de l’entreprise. Tout y passe : les séquences d’aventure familiales, la bataille finale opposant le village à l’antagoniste véreux et des scènes de course-poursuite ! Une chose est sûre : le jeune public ne s’ennuiera pas d’autant plus que l’animation 3D est plutôt de qualité (sans pour autant faire preuve d’une grande originalité dans le character design de ses personnages). Encore faut-il apprécier l’invraisemblance…
Les limites de la physique sont toujours outrepassées dans les séquences d’action : ça n’a ni sens ni vraisemblance, mais n’oublions pas que la séquence d’introduction prenait le soin de nous montrer l’imagination débordante du protagoniste de l’histoire. Mais est-ce suffisant ? La caméra aérienne s’empare de cette histoire grand guignolesque et les scènes virevoltantes s’entremêlent avec les ralentis caractéristiques. Les spectateurs en ont visuellement pour leur argent, mais peut-on en dire autant du coeur de l’histoire et de ses enjeux narratifs ?
Si l’on gratte un peu plus la surface du récit, le long-métrage de Gonzalo Gutiérrez avait toutes les cartes pour offrir un divertissement familial de qualité, qu’il s’agisse de son histoire d’amour naissante, de ses épreuves en amitié ou de son sous-texte écologique pertinent, mais à trop miser sur l’action débridée, le film se perd… Tout en lorgnant du côté des autres univers animés pour se construire. Autre exemple s’il en fallait un : la bande originale du film. Véritable pot-pourri de tous les styles musicaux, de la musique classique, du rock américain, des cornemuses, du disco, elle représente à merveille les contours d’un film qui veut trop en faire. Ces instants musicaux, diégétiquement intégrés par l’humour débridé des lapins accompagnant le héros, ne manquent parfois pas d’humour mais ils confinent Les Explorateurs : l’aventure fantastique à l’abondance contre-productive.
En somme, Les Explorateurs : l’aventure fantastique n’est qu’une énième proposition en 3D à l’originalité mesurée mais au dynamisme assumé. Les plus jeunes embarqueront sans peine dans cette aventure menée à toute vitesse tandis que les plus grands regretteront le manque de singularité d’un projet piochant un peu partout au lieu de construire sa propre identité. La fin ouverte laisse à penser qu’une suite pourrait voir le jour, il faut alors espérer que l’équipe créative saura refréner ses ardeurs pour bâtir les contours d’une oeuvre plus sincère.