Une belle année 2023 s’ouvre pour les studios TAT Productions toulousains qui, après leur aventure médiévale dans Pil en 2021, nous invitent à prendre part à l’odyssée homérique de Pattie, une jeune souris prenant part à l’un des mythes grecs les plus connus (Jason et la toison d’or) sous un œil nouveau ! Aventure récréative et foisonnante, Pattie et la colère de Poséidon s’adresse avant tout au jeune public mais saupoudre son récit de références savoureuses pour convaincre les plus grands sur le trajet !
Résumé : La vie s’écoule paisiblement à Yolcos, belle et prospère ville portuaire de la Grèce antique, lorsque la population est menacée par la colère de Poséidon. Une jeune souris aventurière et le chat qui l’a adoptée vont alors aider à son insu le vieux Jason et ses Argonautes dans leur quête pour sauver la cité. Mais bien plus qu’un coup de main, l’opération les amènera finalement à affronter les créatures mythiques les plus dangereuses de la mythologie et à surmonter tous les dangers à leur place.
Après une introduction en 2D de rigueur pour mettre en place le décorum mythologique de l’intrigue, le long-métrage nous présente son héroïne minuscule, prête à embarquer dans une aventure démesurée. En apprenant à connaître la jeune Pattie, doublée avec candeur par Kaycie Chase, on rencontre aussi son père adoptif, le chat Sam, moins téméraire que sa fille. Héroïne forgée dans le moule traditionnel des héros incompris, Pattie et ses ambitions aventurières sont inévitablement moquées par les autres mais c’était sans compter les hasards (arrangeants) du destin qui la mettent sur la route d’un Jason vieillissant contraint de repartir en mer pour sauver la cité de Yolcos de la fureur divine du frère de Zeus. Hommage aux mythes antiques, le film se rit beaucoup de l’orgueil (l’hybris) des dieux et des héros (l’élément perturbateur n’est-il pas une statue de Zeus provoquant la jalousie de son frère, dieu des mers et des océans ?), quitte à les ridiculiser au cours de séquences guidées par un vif esprit parodique.
Dans la droite lignée des récits célébrant le courage des petits êtres dans une aventure hors du commun, Pattie et la colère de Poséidon embarque ses spectateurs dans un voyage des plus mouvementés comportant son lot de scènes d’action revigorantes. Pattie et ses acolytes y croisent un panel incroyable d’êtres merveilleux honorant le bestiaire des écrits mythiques : hydre, scorpions géants, cyclopes ou même morts-vivants, l’histoire regorge de détails qui feront sourire les adultes tout en enthousiasmant le jeune public. On croirait presque voir un Choc des Titans pour enfants en certains endroits, d’autant plus que le character design de ces monstres mythologiques, tout en rondeurs, assume pleinement cet axe plus espiègle. Si les limites budgétaires d’un tel projet se font parfois sentir (comme ces figurants humains aux mêmes visages qui peuplent la ville de Yolcos), on retrouve néanmoins avec plaisir le savoir-faire en 3D numérique des équipes à la barre du long-métrage. On se pâme notamment devant l’immensité dangereuse de la mer et l’impressionnante architecture grecque propre à l’Antiquité.
La civilisation antique est véritablement célébrée par le film, qu’il s’agisse de clins d’oeil au théâtre, à la poésie ou aux êtres composant les mythes : au risque d’en faire trop ? Le ton parodique choisi par l’équipe créative, finalement marque de fabrique des studios depuis leurs débuts, est manifestement la colonne vertébrale du projet. Le scénario mise parfois trop sur l’humour, qu’il s’agisse d’une attaque en mer par une pieuvre agissant comme un bébé ou même d’argonautes squelettiques qui servent uniquement de sidekicks comiques. En cela, le projet de David Alaux manque quelque peu d’originalité et convoque des ressorts maintes fois usités par d’autres projets animés (pensez par exemple aux souris mafieuses à l’accent italien qui rappellent Le Parrain ou même à Flippant le dauphin au nom évocateur). Majoritairement visuels, les gags abondent dans cette aventure mythique : les plus jeunes se réjouiront tandis que les plus grands regretteront peut-être le manque de singularité du métrage.
Les idées ne manquent pas, mais elles desservent parfois le coeur plus humain du récit et l’intrépidité de son héroïne qui s’oppose à l’esprit timoré de son père adoptif. Le film semble même se chercher, y compris dans son usage d’une playlist musicale éclectique qui peine à bâtir l’identité vacillante du film : pop, rock, génériques de séries, élans plus classiques : on ne sait jamais vraiment ce qui caractérise l’univers de Pattie et la colère de Poséidon, si ce n’est sa volonté de porter un regard humoristique sur un récit fondateur. Pourtant, les qualités sont nombreuses dans ce projet d’envergure : d’un numéro musical assez drôle et bien mis en scène embrayé par une mouette-pirate hilarante (doublée par Emmanuel Curtil qui s’éclate) jusqu’aux belles lumières célébrant la chaleur des îles grecques, le long-métrage de David Alaux demeure une belle aventure propice à une séance familiale. Le message universel délivré par l’histoire est aussi des plus charmants puisqu’il fait l’éloge de l’accomplissement personnel : au gré des séquences, les personnages se réalisent. Ainsi, Pattie vit l’aventure de ses rêves tandis que son meilleur ami Luigi déploie ses capacités martiales en fan d’art ninja qu’il est. C’est naïf, mais que cela fait du bien !
Au final, Pattie et la colère de Poséidon parvient avec gaieté à réinventer un mythe antique même s’il s’éparpille parfois entre ses choix créatifs et ambitieux. Fort de sa palette de personnages attachants et d’une animation emplie de candeur, le navire filmique de David Alaux emportera son public cible, à défaut d’emmener à son bord les plus exigeants des cinéphiles.
Rendez-vous le 25 janvier prochain en salles via Apollo Films.
Et c’est une première : les équipes de TAT Productions nous donnent rendez-vous cet été pour la sortie des As de la jungle 2 que nous attendons de pied ferme ! Deux longs-métrages en un an : les équipes n’ont pas chômé !